- Mercredi 21 Septembre, 22:30. Aujourd'hui, j'ai travaillé sur la Transmutation d'âme - c'est-à-dire enfermer une âme dans un vulgaire objet. Lors de mon stage avec Maître Heintze, à Dortmund quelques collègues à lui ont mentionné "Horcruxe" , dictai-je à mon dictaphone magique qui suspendu dans les airs, enregistrait chaque information avec minutie. - Au départ, je croyais que ce n'était qu'une légende inventée par les mages noirs pour terroriser les sorciers. C'est tabou ; peu de gens (encore en vie) sont au courant. Cela fera presque quatre ans que mes recherches ont débuté. Un seul livre y fait référence. Malheureusement, je n'arrive pas à le retrouver. Selon les rumeurs, il serait à Poudlard. Certaines de mes sources m'ont néanmoins confirmé que c'est bel et bien une Transmutation d'âme. Et cela transgresse bien sûre une des lois fondamentales de l'Alchimie qui est de ne jamais jouer avec la vie humaine. Mais, ça reste intéressant à comprendre et non à reproduire. C'est tout pour ce soir. Le dictaphone s'éteignit et se posa sur la table, à côté des grimoires en pêle-mêle qui commençaient à s'accumuler dangereusement. Avachie sur ma chaise, je feuilletai chaque page à la recherche d'un quelconque indice sur les Horcruxes dans Grandeur et décadence de la magie noire. Aucun résultat. Je soupirai, puis retirai mes lunettes de vue. Je m'étirai en regardant l’astrolabe, en haut de l'étagère. - Il devait envoyer une lettre depuis au moins un heure déjà. Soudain, une lettre s'était glissée sous la porte de mon bureau. Je la ramassai, l'ouvris. Une voix rauque et masculine en sortit et déclara : - Bonsoir, Mlle Rosendahl. Ici, Wyrtgeorn Mcintyre. Lors de la réunion, il était convenu que je vous envoie les détails de la prochaine mission, les voici : la mission se déroule à l'Impasse du tisseur, dans un repère Rafleur. Le but : infiltrer les Rafleurs, récupérer des informations. Mes espions au Ministère me disent que les Deatheaters trament quelque chose et je veux le découvrir. J'écoutais d'une silence religieuse les instructions, je savais à l'avance que pour cette mission, ce cher Maugham sera de la partie - je grimaçai - Pour cette mission, vous serez avec Marat Maugham. Je vous en supplie : essayez de ne pas foutre en l'air cette mission, comme la dernière fois. Je roulais les yeux au ciel. - Est-ce clair ? Vous avez rendez-vous avec votre co-équipier derrière une maison de l'Impasse du Tisseur, demain à 23:00. Ne soyez pas en retard, Rosendahl. Cordialement, Wyrtgeorn Mcintyre. La lettre se déchira en mille morceaux, puis disparut. Je ne pus alors m'empêcher de répliquer . - J'espère que c'est Maugham qui sera à l'heure, cette fois-ci. (...)
Le lendemain. La gifle partit, le léger sifflement se transforma en un douloureux écho. - Tyrone, tu n'as pas intérêt à franchir cette porte. Une main posée sur ma joue enflée et de l'autre ma baguette magique comprimée entre la paume et les doigts, mon regard manifestait colère et peur et je pointais la baguette vers Tybalt. - Ne m'approche pas, ne m'approche pas. , soufflai-je avec difficulté. La douleur lancinante, je ne quittais pas du regard mon fiancé qui voulait réparer sa faute en tentant de me calmer. - Je te jure. Je ne voulais pas. Mon amour, je suis désolée. Je n’éprouvais plus que du dégoût pour cet homme. - Hors de ma vue, Gerst. Il continua à bloquer la porte. Les mains en l'air, il tenta une approche mais je reculais par sécurité. Méfiante, je ne relâchai pas ma garde. Tremblante, je criai : - Je te préviens, je n'hésiterai pas à te tuer s'il le faut. Pour la dernière fois Gerst, ECARTE-TOI DE CETTE FOUTUE PORTE. Résolu, il s'écarta légèrement de la porte et me laissa partir. Je franchis son seuil en courant, puis me transplana. J’atterris gracieusement derrière la maison indiquée par Mcintyre, je cachai la rougeur à ma joue derrière quelques mèches de cheveux avant d'apparaître devant Marat qui m'attendait. A le voir ainsi, il m'attendait depuis longtemps les bras croisés, me scrutant de ses yeux acier. J'étais en retard, je le savais. Je m'avançai vers lui : - Désolée du retard, Maugham. Un empêchement de dernière minute... Je poursuivis les yeux baissés, je ne préférais pas le regarder. Je me mordillais les lèvres, signe d’inconfort. Un petit sac pendouillait sur mon épaule. De ma main gauche, j'en sortis le nécessaire - essentiellement des potions. On ne pouvait pas prévoir ce qu'il pourrait arriver lors de cette mission. Je lui tendis les fioles et lui expliqua : - Alors, il y a un philtre de confusion, un fluide explosif, une potion pour blessures puis un poudre de obscurité instantané. Je reprenais peu à peu mes esprits, je pouvais souffler. La présence de Maugham m'apaisait, me faisait sentir en sécurité - elle pouvait parfois être bénéfique. - Prêt, Maugham ? C'est quand tu veux., lui demandai-je poliment. J'allais m'éloigner, mais il m'en empêcha.
Trop à l'étroit dans ce tunnel caché juste en dessous de la baraque où un groupe de neuf Deatheaters fêtait une victoire encore inconnue. Les choses chauffaient: la bande avait décidé de partir faire la tournée des bars – quand ils en auraient marre des bars sorciers, ils s'attaqueraient aux bars moldus, et ils ne devaient pas les laisser quitter l'endroit. Tyrone avait refusé d'allumer les baguettes ou les lampes frontales, et l'obscurité ainsi que le manque d'oxygène les mettaient mal à l'aise, l'un contre l'autre. « Maintenant, la poudre asphyxiante » avait murmuré Tyrone. D'un mouvement vif, Marat avait arrêté son geste, et murmuré: « Pas maintenant ». Les Deatheaters mettaient leurs manteaux, ils avaient encore une chance d'avoir l'information. Il tendit l'oreille, mais Tyrone dégagea sa main de la sienne et s'apprêta à décapsuler le gaz. « Non, Tyrone non. » Elle lui jeta un regard perçant. « C'est maintenant ou jamais », et, d'un mouvement rapide, elle décapsula le gaz avec ses dents. Marat hallucinait, hallucinait totalement. « Arrête... arrête de prendre des initiatives sans... » il empoigna la capsule et la balança à l'autre bout du tunnel – elle explosa en faisant tomber toute la terre sur eux deux, détruisant une partie du plancher au-dessus d'eux. Marat se jeta au-dessus de Tyrone: s'ils la voyaient, elle était morte, et elle transplana en moins de deux. Au milieu du trou sans bois, il était là, sous les yeux abasourdis des mangeurs de mort. Il les entendit à peine s'écrier: « Maugham! » avant de transplaner à son tour. Mcintyre avait passé un quart d'heure à leur faire comprendre qu'ils n'étaient que deux idiots incapables de bosser en équipe, et qu'il les épargnait uniquement parce qu'ils étaient leurs deux meilleurs éléments. Chacun avait levé les yeux au ciel, restant campé sur ses positions: on avait encore du temps / on n'avait plus une seule seconde.
D'un air las, Marat retaillait sa baguette magique avec la lame extrafine d'un couteau d'argent fabriqué par des gobelins, la sentant frémir sous ses doigts, tandis que le message de Mcintyre terminait. En effet, puisqu'il s'agissait de s'en rappeler, la dernière mission que Marat avait faite avec Tyrone s'était révélée être un échec cuisant. Mais si elle ne voulait pas toujours tout commander aussi, elle était la seule à lui faire le coup à chaque fois, à prendre des initiatives au dernier moment – elle avait peur de l'imprévu lorsqu'elle le sentait se rapprocher à grand pas, tandis que Marat le provoquait, l'attendait en souriant. Peut-être n'étaient-ils pas du tout faits pour travailler ensemble, mais la question était de savoir s'adapter et d'unir leurs compétences. Malheureusement, chacun devait fournir un effort plus que conséquent pour résoudre le problème: aucun des deux ne supportant de laisser l'autre prendre une initiative dangereuse. Tyrone était la seule femme qui ne lui obéissait pas lorsqu'il lui en faisait la demande expresse. Rien de plus agaçant, rien de plus insupportable, rien de plus séduisant? Il sourit en coin. Certainement pas.
Le lendemain. Bientôt vingt-et-une heures, et il cherchait sa seconde chaussure depuis cinq bonnes minutes, avant d'apercevoir un lacet noir dépasser de la gueule de Jango, qui l'observait chercher d'un air innocent. Il haussa un sourcil. - Ça ne me fait pas rire du tout. Il soupira et partit dans le placard chercher une seconde paire de chaussures épaisses, songeant qu'il finirait bien par mettre ses menaces à exécution, c'est-à-dire se débarrasser de ce croup, qui était, à bien considérer les choses, une véritable plaie. Lorsqu'il arriva enfin devant la terrasse du café moldu londonien, Boyd était déjà là, sirotant un cocktail, les pieds sur la chaise d'en face. Marat lui serra chaleureusement la main, avant de s'assoir à son tour et commander un russe blanc. Boyd jeta un regard affectueux à son cocktail jaune éclatant. - Les sorciers ne savent pas ce qu'ils ratent... Puis il reporta son attention sur Marat, qu'il fixa de ses yeux bleus perçants. - Alors Archie, tu sais déjà ce que je vais te proposer, ne perdons pas de temps, si tu veux bien. J'ai un arrivage de clients pour la course du 7, j'ai vraiment besoin de quelqu'un qui puisse gérer tout ça sans faire de pagaille, tu vois ce que je veux dire. Ça va, en ce moment? « Ça va, en ce moment », pour vous qui ne connaissez pas le jargon, ça signifie: « tu gagnes combien depuis trois mois, allez, je sais très bien que t'es raide, et je peux te proposer un pactole à faire pâlir Crésus », car pour ceux qui l'ignorent encore, Crésus était un sorcier, très réputé de façon positive chez les moldus pour avoir été très riche, mal vu chez les sorciers car son sortilège de multiplication d'argent moldu lui avait valu soixante procès en une vie. Cinq cocktails plus tard – Marat ne l'accompagnait pas, interdiction de boire avant une mission de ce genre – ils avaient conclu qu'Archie travaillerait pour Boyd du 6 au 10, et récolterait une somme plus que satisfaisante. Le rouge commençait à monter aux joues de Boyd, qui voulait, pour la troisième fois, fêter cet accord par un cocktail. - Ça suffira comme ça, lui dit Marat en souriant, je suis un peu pressé. Compte sur moi le 7. Il se leva, jeta un peu d'argent moldu sur la table et fit demi tour, cherchant un endroit incongru où transplaner jusqu'à l'Impasse du Tisseur. Dans une rue minuscule bordée d'immenses murs mitoyens aux fenêtres hautes, il transplana sans un bruit, et atterrit au milieu d'une rue sombre et sale, aux odeurs d'urine et d'ordures asséchées par la chaleur de l'été. L'Impasse du Tisseur était éternellement dégoûtante, mais il avait appris à ne pas froncer le nez face à la misère dégueulante. Il venait de quitter les quartiers populaires qui sentaient l'argent frais passé de mains en mains et les cocktails fruités, à présent, il habituait son corps avec une vitesse ahurissante à la mauvaise odeur, à l'obscurité, à l'ambiance générale. Ses pas se faisaient plus légers, son corps se courbait et sa tête se baissait, ce n'était plus le même homme qui marchait. Deux maisons avant celle qu'ils allaient devoir infiltrer, il se posa, un pied contre le mur, et attendit. N'ayant jamais connu le stress, les horaires n'étaient pas un problème pour lui, et il savait attendre sans s'impatienter, au contraire, ce temps libre lui donnait tout le loisir de mettre en place dans son esprit une dizaine de plans, A, B, C, D, E, etc. Parce que si Marat Maugham savait attendre, en revanche, il ne savait pas perdre. Il releva la tête comme un chat tiré de sa méditation par des petits pas qui s'approchaient rapidement. Sa vision lui procura le même effet que d'habitude: une satisfaction étrange, inexplicable, s'empara de lui. Pour l'avoir très longuement observée, il connaissait par cœur sa démarche, les mouvements de son corps, les phrases de ses cheveux, la brillance de ses yeux. Il la regarda s'avancer sans ciller, et remarqua, évidemment, sa joue gonflée. L'hématome s'était formé au dessous de l'œil, il était encore rougeâtre, mais dès demain, il serait bleu foncé. Tyrone Rosendahl n'était pas le genre de femme à trébucher contre son aspirateur. Il l'observa sortir une à une ses fioles, sans vraiment l'écouter. Tandis qu'elle s'apprêtait à se diriger vers la maison visée, pour se mettre en position, il saisit son bras et l'arrêta, la rapprocha de lui, à une distance convenable, détaillant sans se gêner sa joue maltraitée. - Et comment s'appelle cet empêchement de dernière minute?... murmura-t-il sans la lâcher. Il observa sa peau blanche, ses joues teintées d'un rose soutenu, ses yeux bleus poupons, ses lèvres fines et sèches, son menton pointu de sorcière imprévisible, cet hématome gonflé qui déchirait ce tableau parfait, et une envie de violence s'empara d'un seul coup de lui, si forte qu'il en lâcha son bras.